Mer d'Aral : un nouveau désert, des tombes de géants
La disparition progressive mais irréversible de la Mer d'Aral serait due selon certains hydrologues à l'assèchement de ses affluents, le Syr-Daria et l’Amou-Daria (détournés pour irriguer des plantations !), alors que celle de sa voisine plus au sud, la Mer Caspienne, un important changement de débit de la Volga. Seulement, des découvertes archéologiques récentes, sur le fond asséché de la Mer Aral, semble révéler que ce n'est pas la première fois que la Mer d'Aral disparaît... et réapparaît !
En effet, c'est toute une ville antique, ou tout au moins ses vestiges, qui auraient été retrouvés, ainsi que des restes humains, enterrés sur ce qui était encore il y a 40 ans le fond de la Mer Aral... pire, selon des études très sérieuses, cela serait la quatrième fois que la Mer s'assèche presque complètement avant de revenir...
L'historien Z. Bouniatov, dans l'un de ses ouvrages, décrit en effet déjà une campagne de conquête du Chah de Khorezm sur le fond asséché de la Mer au... 12ème siècle ! En fait, il y décrit que ces hommes ont parcouru ce territoire à l'époque, qui était alors une steppe parcourue de routes commerciales et où s'élevaient alors quelques cités florissantes et où les habitants y cultivaient du blé, du mil et des légumes...
Lorsque la mer s'est assez brutalement retirée à des dizaines de kilomètres des ports, il y a maintenant 45 ans, personne ne connaissait ou se souvenait de cette histoire, et la population a paniqué en voyant tout ces bateaux échoués... depuis, le climat s'est modifié et une quarantaine d'espèces animales ont disparu. Durant les vingt dernières années, l'Aral a perdu 640 km cubes d'eau, faisant émerger 2,6 millions d'hectares de terres désertes, nommées maintenant Aralkoumami.
En fait, au début des années 1960, les économistes soviétiques, surtout soucieux de rentabilité, décident d’intensifier la culture du coton en Ouzbékistan et au Kazakhstan. Pour irriguer les cultures, ils font détourner les deux fleuves. Non seulement la mer d’Aral n’est plus alimentée mais les deux fleuves sont également à sec... Des tonnes de défoliants déversés de manière anarchique sur les cultures ont achevé la catastrophe. Au fil des années, les produits chimiques balayés par le vent se sont dispersés dans les villages environnants. L’ancien port prospère de Mouinak est devenu une ville empoisonnée. La vie y est devenue impossible à cause de la pollution de l’eau et de l’air. La population qui habitait près de la mer a dû fuir ces lieux pestilentiels où la mortalité infantile est de 118 pour 1 000. Un taux comparable à celui du Bangladesh... Il reste sur les 48 000 habitants de Mouinak, 20 000 personnes environ qui sont toutes atteintes de maladies graves : tuberculose, affection du sang, cancers …
D'après les constatations, le vent assez fort par moment y soulève chaque année 100 millions de tonnes de poussières salées et toxiques qui vont se déposer jusque sur les glaciers du Tian Shan, du Pamir et de l’Altaï... à tel point que l'ONU a financé un programme important qui a pu redonner de l'eau à la partie nord de l'ancienne mer, appelée maintenant la "Petite Mer d'Aral", et a tenter l'implantation d'arbustes locaux (des saxaouls) sur le reste du désert, pour empêcher les poussières. Malheureusement, les problèmes financiers généraux ont interrompu longtemps ce programme, qui n'a pu reprendre en partie que récemment...
Du coup, des études plus sérieuses ont été menées pour connaître les raisons exactes de ces disparitions et retours d'eaux apparemment historiques...
Un scientifique russe a un moment donné cru déceler un lien entre la récente hausse du niveau de la mer Caspienne et le brusque rétrécissement de la mer d’Aral. Il pense que ces deux mers sont séparées par des roches sédimentaires poreuses comportant de nombreuses fissures, failles et canaux. Cette “digue” fragile aurait longtemps maintenu les eaux de l’Aral à près de 70 mètres au-dessus de celles de la mer Caspienne. Un infime mouvement tectonique aurait alors suffi à rendre le système perméable, et la “digue” aurait cédé. Mais la montée de la Caspienne ne s'est pas maintenue.
L’académicien russe N. Chilo a une autre vision des choses. Pour lui, le fond de ces deux mers serait constitué de sédiments très friables que le moindre mouvement tectonique ferait gonfler ou comprimerait comme une éponge. Selon les époques, l’eau serait ainsi absorbée ou rejetée par la roche...
Archéologie :
Mer d'Aral, des géants ! En plus des écrits historiques de L'historien Z. Bouniatov, une découverte capitale a été faite lors de la mise en œuvre du projet pour sauver la Mer d’Aral : une implantation, datant du XIVème siècle après J.-C., couvrant un site funéraire qui pourrait remonter au IXème siècle après J.-C., dans un endroit qui, une dizaine d’années auparavant, était encore recouvert d’eau.
Concernant les tombes, elles contiennent les dépouilles d’anciens guerriers. L’une des caractéristiques surprenantes de ces squelettes est leur taille : plus de 2 mètres – d’autant plus surprenante que la taille moyenne des ethnies de la région est bien en-deçà de cette taille. Les anthropologues et les archéologues font des recherches pour trouver l’origine de ces mystérieux guerriers. (citation regard-est.com)
Kazakhstan : Le mystère de la Mer d’Aral...
Par Céline GAUDIN (Bureau de relations du Kazakhstan avec la Presse Européenne)
Une découverte archéologique dans la partie sud de la Mer d’Aral asséchée n’est pas seulement un mystère en soi, mais pourrait être la preuve d’un cycle climatique ayant affecté la Mer depuis des siècles.
Une découverte capitale a été faite lors de la mise en œuvre du projet pour sauver la Mer d’Aral : une implantation, datant du XIVème siècle après J.-C., couvrant un site funéraire qui pourrait remonter au IXème siècle après J.-C., dans un endroit qui, une dizaine d’années auparavant, était encore recouvert d’eau.
Le site est daté très précisément du XIVème siècle alors que les objets quotidiens trouvés sur le site, fragments de céramique, sont décorés d’ornements similaires à ceux du Mausolée Khoja Ahmad Yasawi (construit au temps de Tamerlan, et récemment ajouté par l’Unesco à la prestigieuse liste du Patrimoine Mondial de l’Humanité). Ces céramiques sont remarquablement bien conservées et les couleurs vives ont survécu au temps et aux éléments. Le site a livré suffisamment d’indices pour permettre à la délégation kazakh en charge des fouilles de reconstruire une maquette assez précise du site.
Concernant les tombes, elles contiennent les dépouilles d’anciens guerriers. L’une des caractéristiques surprenantes de ces squelettes est leur taille : plus de 2 mètres – d’autant plus surprenante que la taille moyenne des ethnies de la région est bien en-deçà de cette taille. Les anthropologues et les archéologues ont encore des explications à proposer pour trouver l’origine de ces mystérieux guerriers.
En soi, cette découverte est capitale d’un point de vue archéologique, mais ce qui la rend encore plus remarquable est que le site en lui-même était recouvert par la mer une dizaine d’années auparavant. Il ne ‘agit pas de remettre en question le fait que le retrait actuel de la Mer d’Aral soit causée par le système soviétique d’irrigation, néanmoins la découverte pose l’hypothèse d’un cycle climatique sur la Mer d’Aral : en effet, le sol sur lequel l’implantation est construite est constitué de plusieurs strates de sel et de terre alternées, suggérant par là même que la zone a connu plusieurs phases de retrait et de retour de la mer.
« Cette nouvelle découverte semble indiquer qu’il y a eu des périodes de sécheresse et des périodes de « remplissage » de la Mer d’Aral, et que ces dernières observent un cycle » explique Serikbaï Nurgisaev, Akim (Gouverneur) de la Région de Kyzyl-Orda (Région de la Mer d‘Aral Nord). Tandis que les travaux sont en cours pour remettre de l’eau dans la Mer d’Aral, que va-t-il advenir de ce site archéologique ? Premièrement, les efforts pour élever le niveau de la Mer sont pour le moment restreints à la partie Nord de la Mer, autrement dit le site n’est pas en danger à court ou moyen terme. (cf carte) Toutefois, lorsque la Mer d’Aral Nord aura atteint un niveau de 44 mètres (son niveau est de 40 aujourd’hui) l’excès d’eau sera reversé dans la partie sud. Si les efforts pour sauver la Mer d’Aral Nord sont un succès, l’Ouzbékistan pourrait entreprendre un projet similaire sur son territoire.
Or si la Mer d’Aral Sud recommence à se remplir, la nécessité de préserver un tel site se fera sentir. Des projets ont déjà été conçus afin de rééditer – bien qu’à plus petite échelle – l’incroyable défi technique de la migration des deux temples d’Abu Simbel (Egypte) dans les années 60. Il avait s’agit alors de les sauver des eaux montantes, dues au barrage de Aswan. Toutefois, le site kazakh n’est pas encore directement menacé d’inondation.
Cette découverte est capitale afin de comprendre plus avant la région en terme historique et écologique. Bien que de nombreux travaux soient à venir afin de jeter toute la lumière sur l’origine de ces mystérieux guerriers et les fluctuations de taille de la Mer, cette découverte archéologique est l’une des plus importantes des dernières années dans la région.
La cité antique d'Itil, sur la Mer Caspienne :
Historiquement, İtil était la capitale de la Khazarie entre le VIIIe siècle et le Xe siècle. La ville était décrite comme étant située sur le delta de la Volga juste au niveau de la Mer Caspienne.
Après la défaite des Khazars lors de la seconde guerre arabo-khazare, Itil devient la capitale de la Khazarie. L'empire Khazar n'ayant pas laissé de sources écrites, on connait son nom par des sources arabes qui l'appellent Khamlij au IXe siècle et Itil au Xe.
À son apogée, la ville était un centre commercial important et était divisée en trois quartiers : sur la rive ouest de la Volga, entre les deux cours de la Volga dans le delta et sur la rive est de la Volga. La partie ouest de la ville abritait le centre administratif de la ville, le tribunal et une imposante garnison. La partie est, construite ultérieurement servait de centre commercial de la ville, avec de nombreuses boutiques et des bains publics. Les palais du Khagan et du Khagan Bek trônaient sur une île située entre les deux jambes de la Volga. L'île était connectée à une des deux autres parties de la ville par un pont. Selon certaines sources arabes, la partie Ouest de la ville portait le nom d'Itil alors que la partie Est celui de Khazaran.
Itil était une ville où cohabitaient de nombreuses confessions : le khagan était juif comme la grande majorité des Khazars, mais il y avait aussi des chrétiens, des chamanistes et des païens. L'importance commerciale de la ville attirait des marchands de nationalités diverses. Toutes les confessions avaient leur lieux de culte et sept juges étaient nommés pour résoudre les querelles entre les habitants (deux chrétiens, deux juifs, deux musulmans et un païen).
Sviatoslav Ier de Kiev pille et détruit Itil en 968 ou 969. Ibn Hawqal et al-Muqaddasi font mention d'Itil après 969, ce qui semble indiquer que la ville aurait été reconstruite. Al-Biruni (au début des années 1000) rapporte qu'Itil était encore en ruine et ne parle pas de la ville de Saqsin qui sera construite ultérieurement dans la région. Il est possible que la nouvelle Itil ait été détruite au milieu de XIe siècle.
Pendant très longtemps, aucune recherche archéologique n'a pu trouver les restes d'Itil, une des hypothèses étant que la montée de la Mer Caspienne a détruit les restes de la ville. Toutefois, depuis 2003, l'archéologue russe Dmitri Vassiliev, de l'Université d'Astrakhan, mène une série d'excavations près du village de Samosdelka (Самосделка), situé à 40 kilomètres au sud d'Astrakhan, dans le delta de la Volga et, en septembre 2008, son équipe a confirmé avoir retrouvé là les ruines d'Itil.
On note que, de toute façon, cette région Caspienne-Aral est habitée par l'homme depuis des temps immémoriaux... des datations de traces humaines dans certaines grottes remontent à 29.000 ans avant notre ère minimum... même les nomades connus comme ceux de la région Marlik nous ont laissé des témoignages de leur raffinement mystérieux, qui ne correspond d'ailleurs pas du tout à leur statut de chamans nomades, comme par exemple cette coupe en électrum (88% à 89% d'or et le reste en argent) gravée de sphinx, ou lions avec ailes, estimée de l'époque du 2ème millénaire avant JC ! :
Ancienne collection Yegotiel Saidnian - nécropole de Cheragh-Ali Tepe - Estimation : 500 000 - 600 000 € (!)
Sources : http://www.dinosoria.com/mer_aral.htm, Wikipedia.fr, http://www.regard-est.com/home/breves.php?idp=13&PHPSESSID=a37252510eacbf7f9416b54c4f2af10e
Notons aussi que nous sommes proches géographiquement de mon article sur la civilisation de l'Oxus... et voici un autre lien intéressant en parlant :
http://www.ambafrance-tj.org/La-cooperation-archeologique
Yves Herbo, Sciences, F, Histoires, 16-12-2014