Une datation supplémentaire de C14 avec les raffinements de la méthode de C14 (calibration) a maintenant produit les dates les plus récentes pour le bateau Ferriby Un 1880 BC - 1680 BC et le bateau Ferriby Deux 1940 BC-1720 BC. Le bateau Ferriby Trois étant daté de 2030-1780 BC (BC = Before Christ, Avant JC). Les bateaux Ferriby ont été acclamés publiquement comme les premiers engins maritimes d'Europe en mars 2001. Il serait en fait étonnant que le hasard nous ait fourni les tous premiers navires de l'Europe, avec d'ailleurs des maitrises de fabrication qui prouvent que leur concept est bien plus ancien, tout comme leur pratique.
En 1963, Ted Wright a fait sa découverte la plus importante, le troisième des bateaux de l'âge du bronze. Un embarcation de 50 pieds ayant la forme d'une tranche de melon, avec de la place pour 18 pagayeurs. Il était fait de planches de chêne épaisses liées par des branches d'if torsadées et scellées avec un calfeutrage de mousse. La dernière technologie de datation a déterminé que le bateau de l'âge du bronze pourrait avoir 4 000 ans, ce qui en fait le plus ancien engin marin connu d'Europe.
Les Ferriby Boats étaient des navires construits en planches et auraient à l'origine une longueur de près de 16 m avec une largeur maximale d'environ 2,5 m. Ils avaient des lignes courbes, un écharpement de planches pour former une virure de quille et les planches étaient assemblées, une tradition sophistiquée de construction de bateaux. Leurs planches rectangulaires étaient cousues entre elles avec de la ficelle épaisse de Withy (fortes tiges de saule flexibles maintenant utilisées dans le chaume et le jardinage), les intervalles étaient calfeutrés (procédé utilisé pour sceller les coutures des bateaux en bois afin de les rendre étanches) avec de la mousse. Les haubans et les nervures à taquets confèrent de la rigidité à l'embarcation assemblée.
Ces bateaux sont considérés comme faisant partie d'un chantier naval sur l'estuaire de la Humber, la construction ainsi que la navigation y étaient impliquées.
En fait, la technologie et la taille des bateaux ont conduit les experts à réévaluer la société de l'âge du bronze. Les bateaux Ferriby soutiennent la croyance que l'homme était capable de traverser les océans il y a plus de 4 000 ans. On peut même dire en fait que si on regarde du côté de l'Asie, dire 4000 ans est vraiment un minima peu crédible.
Sources :
https://www.penn.museum/sites/expedition/the-bronze-age-boats-of-north-ferriby-yorkshire/
http://www.ferribyboats.co.uk/dating/index.html
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bateaux_de_Ferriby
http://museumcollections.hullcc.gov.uk/collections/storydetail.php?irn=470&master=424
Les pirogues monoxyles
Les plus anciens exemplaires connus apparaissent dans le contexte du premier Mésolithique aux Pays-Bas, en Allemagne et en France septentrionale dans le courant du VIIIe millénaire av. J.-C.. Leur présence y est continue par la suite, avec une prolongation vers le Danemark.
La pirogue monoxyle de Noyen-sur-Seine (Seine-etMarne), 7190-6450 cal. BC, lors de sa découverte. Longueur (conservée) : 4 m, (estimée) : 5 à 6 m ; largeur : 0,55 m, en pin sylvestre (Pinus sylvestris) (d’après Mordant et al., 2013, fig. 3 A). Une de ses extrémités est dotée d’un replat à surface carbonisée (réceptacle d’un foyer ?)
Les capacités maritimes supposées des pirogues monoxyles sont essentiellement fondées sur des expérimentations. Les expéditions Monoxylon, notamment (Tichy et Dohnalkova, 2009), ont testé, en 1995 et 1998, les aptitudes de navigation de deux pirogues à balancier par cabotage en Méditerranée et dans l’Atlantique au large du Portugal. Cette pirogue en chêne à balancier simple a parcouru, en plusieurs étapes, 800 km à la vitesse moyenne de 4 km/h. La navigation paraît être possible par temps agité, même s’il semble exagéré de la prétendre apte à naviguer jusqu’à des vagues de 2 m et des vents de 7 à 9 Beaufort – « Grand frais » à « Fort coup de vent » – comme le font des auteurs. À Sanguinet, dans les Landes, les pirogues protohistoriques et antiques sont réputées avoir pu caboter en mer, le lac étant alors relié au littoral par un exutoire estuarien. Un test mené avec la réplique d’une pirogue antique a montré sa bonne adaptabilité au redoutable passage des barres de plage (Dubos, 2006). La pirogue de La Marmotta, sur le lac de Bracciano au Nord de Rome, d’âge Néolithique ancien cardial, porte deux taquets latéraux traversant le bordé, qui pourraient avoir été des supports pour attacher une autre pirogue ou avoir reçu un balancier (Fugazzola Delpino et Mineo, 1995). Plusieurs pirogues du Néolithique final nordique possèdent une série de trous horizontaux placés de bord à bord dans leur partie supérieure : Øgarde 3, vers 3190 cal. BC, Verup 1 vers 2770 cal. BC (McGrail, 2001, p. 172) ; on les interprète comme les indices de présence de liens reliant les bords lors de la construction, mais ils pourraient aussi résulter de l’accolement de deux pirogues. En définitive, les seules preuves d’accolement dont nous disposons viennent de maquettes méditerranéennes beaucoup plus récentes (Marangou, 1991). Enfin, il n’est pas rare, en Europe du Nord, de mettre au jour ce type de bateau sur des sites côtiers comme Sanguinet, par exemple à Stralsund, en Allemagne, au Ve millénaire (Klooss et Lübke, 2009) et à Carpow, en Écosse, au Ier millénaire (Strachan, 2010), ce qui pose inévitablement la question de leur utilisation côtière. Il est plus difficile de les imaginer traçant leur route au large, car des bateaux de peaux sur charpente légère auraient été beaucoup plus efficaces pour cet usage.
Les bateaux de peaux sur charpente légère
Les plus simples consistent en une unique peau de bovidé formant un sac de cuir affermi par un cadre végétal inséré (fig. 17). Il s’agit des coracles, encore très répandus au Pays-de-Galles. Ces embarcations légères, facilement transportables, sont parfaitement adaptées aux courts déplacements en eaux intérieures, mais on les trouve aussi en contexte d’embouchures, où elles assuraient quelques liaisons côtières en Amérique du nord (Gormley et John, 2012). Elles ont pu être en usage durant la Préhistoire européenne. Les bateaux plus complexes, mais avec de meilleures capacités de navigation, sont faits de plusieurs peaux soigneusement cousues et appliquées sur un cadre préassemblé. L’étanchéité de la peau est assurée par un graissage régulier, celle des coutures par un calfatage (laine, goudron naturel, par exemple). Ils peuvent être circulaires ou elliptiques, mais ceux des périodes historiques destinés à évoluer en milieu marin (par exemple : curragh, umiak) sont généralement pourvus d’une étrave effilée et relevée qui améliore leurs capacités de déplacements maritimes (fig. 19). La peau n’intervenant pas comme soutien structurel, ces bateaux sont cependant limités en longueur. Une autre limite fonctionnelle est posée par l’entretien constant qu’exigent ces bateaux pour le maintien de l’étanchéité des peaux, des coutures et des ligatures du cadre (Adney et Chapelle, 1964 ; Ames, 2002). Toutefois, la plupart des auteurs considèrent que sa parfaite adaptation à l’économie préhistorique et à la dynamique du milieu marin rend son usage plus probable en mer que toutes les autres embarcations traitées ici (Case, 1969 ; Callaghan et Scarre, 2009 ; Peacock et Cutler 2010 ; Rowley-Conwy, 2011 ; Bjerck, 2013). Une navigation expérimentale transatlantique d’une reconstitution de curragh du haut Moyen Âge mesurant 10 m de long a montré sa grande stabilité et une résistance élevée en dépit des fortes contraintes qu’a éprouvées le bateau en mer (Severin, 1978). Il semble même que certains exemplaires ont pu atteindre des dimensions imposantes, à la fin de l’âge du Fer (fig. 20), si l’on en croit une maquette en or du 1er siècle av. J.-C., figurant un grand curragh de mer provenant d’un dépôt mis au jour à Broighter, comté de Derry, Irlande (Farrell et Penny, 1975). La charge normale pour un canoë domestique de 6 à 10 m de long se monte à 10 à 15 personnes avec leur équipement (Ames, 2002).
Il est donc possible de postuler que des bateaux de peaux ont pu coexister avec les premières pirogues monoxyles, voire même avant celles-ci, au moins depuis le IXe millénaire av. J.-C. et l’apparition des pagaies dans l’enregistrement archéologique. La présence de bateaux de peaux semble même pouvoir être la seule hypothèse susceptible de répondre aux données environnementales propres à la colonisation des espaces côtiers libérés par le retrait des glaciers Weichséliens en Norvège (Bjerck, 2013) comme en Écosse (Bonsall et al., 2013) vu l’absence de toute essence d’arbre propice à la réalisation de pirogues, au moment de ces diffusions humaines.
L’absence paradoxale de leurs produits dans l’enregistrement archéologique serait alors seulement due à la nature éminemment périssable de leurs composants, cause de leur disparition sans traces. Le seul signalement archéologique de leur présence sur notre aire d’étude est en effet constitué par une empreinte relevée sur une sépulture de l’âge du Bronze ancien, qui aurait pu été déposée dans un coracle (Watkins, 1980).
Les indices technologiques (McGrail, 1987 et 2010) suggèrent que des bateaux à peau unique, voire avec plusieurs peaux assemblées, auraient pu être construits dès le Paléolithique moyen, au Mésolithique si le cadre était en vannerie, ou au Néolithique si les éléments étaient fixés avec des gournables (chevilles de bois). Le bois nécessaire à ce type de construction (perches) aurait été disponible dès le Paléolithique. Il est donc tout à fait envisageable de postuler leur présence très tôt sur nos cours d’eaux.
Les bateaux de planches assemblées
La première tradition architecturale connue en Europe atlantique, celle des bateaux « à bordages ligaturés », est documentée par une dizaine de découvertes d’épaves réparties sur tout le littoral du sud de la Grande-Bretagne – et uniquement là, ce qui relève sans doute d’un état fragmentaire de la recherche. Leurs datations se déploient sur tout le IIe millénaire Avant JC. Parmi elles : Ferriby 3, estuaire de la Humber, Yorkshire, 2030-1780 cal. BC - Douvres, estuaire de la Dour, Kent, vers 1550 cal. BC - Goldcliff, estuaire de la Severn, Pays de Galles, vers 1017 cal. BC (Wright et al., 2001). Comme le bateau de Douvres (Clark, 2004a) qui nous servira de modèle, ce sont tous de grands bateaux de planches de chêne à fond plat.
Ce bateau a été estimé pouvoir porter un équipage d’environ 15 pagayeurs et autant de poids en fret d’accompagnement, et pouvoir évoluer dans les bassins inférieurs des fleuves, comme dans le milieu marin. Un fragment de schiste provenant de la baie de Kimmeridge, dans le Dorset, soit à 220 km à l’ouest sur la côte, et qui n’est pas accessible par les voies fluviales depuis Douvres, a d’ailleurs été trouvé à l’intérieur de la coque. L’absence actuelle de tout vestige précédant la dizaine d’exemplaires connus dans les îles britanniques incite à y limiter cette antériorité à quelques siècles, soit dans la seconde moitié du IIIe millénaire av. J.-C.. On pourrait donc pointer du doigt la diffusion du complexe Campaniforme comme possible vecteur d’introduction de cette tradition. Elle aurait pu se constituer autour du foyer originel sur les côtes du sud-ouest atlantique, peut-être en retour de contacts méditerranéens où des embarcations de planches assemblées par ligatures sont utilisées en Égypte depuis le début du IIIe millénaire av. J.-C. au moins (site d’Abou Rawash, Tristant et al., 2014).
Voir les photos et intégralité du texte dans la publication : https://www.persee.fr/docAsPDF/bspf_0249-7638_2018_num_115_3_14923.pdf
En ce qui concerne l'Asie, on parle de dates bien plus anciennes, avec l'arrivée des premiers hommes modernes en Australie, estimée maintenant entre 65000 et 50000 ans, devant traverser, entre les îles indonésiennes, des bras de mer tout de même larges de 70 kilomètres parfois à cette époque. Et en nombre, car les toutes récentes estimations de densité de population ancienne en Australie à l'aide de la génétique porte l'étonnant nombre de ces migrants comme ayant atteint le nombre de 6 millions d'individus très rapidement ! : https://phys.org/news/2021-04-australians-grew-population-millions-previous.html
L'occupation de toutes les îles de la Mer de Chine et de celle du Japon, très tôt (35000 à 29000 ans) par l'homme, et les traditions, font probablement intervenir une navigation très ancienne, possible héritage encore plus lointain d'Homo Erectus, Néandertalien et Denisovien. Par exemple, l'étude de l'ADN des Papous, les aborigènes de Nouvelle-Guinée amène des surprises : Les Papous ont 2% de l'ADN de Néandertal et entre 4 à 6% de l'ADN de Denisovien ! Pourtant, ils sont bien loin des grottes sibériennes denisoviennes... https://lejournal.cnrs.fr/articles/le-genome-des-papous-memoire-de-lhumanite
Quoiqu'il en soit, les traditions et découvertes archéologiques en Asie semblent attester d'une navigation très ancienne, au point que les scientifiques font des reconstitutions et essais, qui prouvent en tout cas que c'était possible, voir probable, il y a 30000 ans... : https://technologiemedia.net/2019/07/03/des-explorateurs-se-rendent-au-japon-dans-un-canoe-primitif/
https://museumtoulouse-collections.fr/pirogues-d-oceanie/?cn-reloaded=1
https://www.sciences-faits-histoires.com/blog/archeologie/navigation-de-taiwan-aux-iles-ryukyu-il-y-a-plus-de-30000-ans.html
Sur la navigation préhistorique en Europe :
https://www.sciences-faits-histoires.com/blog/preuves-autre-histoire/navigation-prehistorique-les-donnees-actuelles.html
https://www.sciences-faits-histoires.com/blog/preuves-autre-histoire/espagne-de-l-atlantique-un-petroglyphe-montre-un-bateau-mediterraneen.html
https://www.sciences-faits-histoires.com/blog/archeologie/angleterre-preuves-d-un-chantier-naval-du-mesolithique.html
https://www.sciences-faits-histoires.com/blog/preuves-autre-histoire/irlande-decouverte-d-un-quai-et-de-bateaux-du-neolithique.html
https://www.sciences-faits-histoires.com/blog/archeologie/irlande-decouverte-d-un-bateau-du-neolithique.html
https://www.sciences-faits-histoires.com/blog/archeologie/un-veritable-chantier-naval-prehistorique-au-pays-de-galles.html
https://www.sciences-faits-histoires.com/blog/archeologie/des-bateaux-de-plus-de-3000-ans-decouverts-au-royaume-uni.html
https://www.sciences-faits-histoires.com/blog/preuves-autre-histoire/civilisations-de-l-atlantique-connexions-et-traces.html
Yves Herbo et Traductions, Sciences-Faits-Histoires, 03-06-2021