Tunisie : exploration de la cité engloutie de Néapolis
Crédit photo : UNO – L’Università a Oristano
Ce n'est pas vraiment une surprise car le site de Néapolis est connu de longue date, mais l'exploration enfin réussie (après 7 ans de tentatives !) du port et d'une partie de la cité engloutie vient de donner un bon appui aux textes antiques sur la survenue d'un fort séisme suivi d'un tsunami le 21 juillet 365 après J-C, et qui aurait aussi d'ailleurs durement touché Alexandrie et la Crète. Un puissant séisme estimé à + 8 en magnitude aurait probablement provoqué l'affaissement du sol au niveau de la baie de Néapolis (près de l’actuelle Nabeul) et un tsunami serait en plus venu engloutir les ruines du port et d'une bonne partie de la ville.
Mais les explorations, depuis 2010 donc, par l’Institut National du Patrimoine tunisien et l’Université italienne de Sassari, ont fini par découvrir d'autres détails importants sur la cité effacée des registres romains, grâce à des conditions météo très favorables cet été 2017...
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En fait, d'après les annales antiques, il se produisit à cette époque deux énormes secousses qui ravagèrent les côtes grecques et crétoises, engloutirent Néapolis, et frappèrent la ville d’Alexandrie. Ce jour-là, la ville créée par Alexandre le Grand en Egypte perdait 5.000 habitants. Fondée au Ve siècle avant J.C, Néapolis siégeait naguère au Nord-Est de la Tunisie, près de l’actuelle Nabeul. En proie aux différentes guerres de factions, entre Rome et Carthage, mais aussi contre les Rois Numides, la cité est très vite devenue un important carrefour pour toute la région du Nord de l’Afrique.
L'ancienne cité située de haut - Crédit photos : Consorzio Uno, L’Università a Oristano
Mais ce qui rend cette découverte d’autant plus extraordinaire, c’est que Neapolis n’apparaît quasiment pas dans la littérature romaine. Alliée des Carthaginois pendant la Troisième Guerre Punique, qui opposa Rome et Carthage de 149 à 146 avant J.C., avec la défaite totale de Carthage, la ville a tout bonnement été rayée des livres d’Histoire par les Romains pendant une longue période, après son pillage par Lucius Calpurnius Piso en 148 av. J.-C.. Toutefois, l'historien romain Ammien Marcellin (330-395) parle bien de ce séisme important (dont il a été probablement témoin) du 21 juillet 365 après J-C, et qui a durement touché Alexandrie et la Crète, alors que l'historien grecThucydide (-460 à -397 av. JC) avait déjà parlé bien avant de Néapolis comme étant un comptoir Carthaginois. On suppose que la cité de Néapolis a tout de même plus ou moins surmonté tous ces événements (à l'aide de sa production de condiments et salaison) jusqu'au moins 646 après J.C. puisqu'elle est citée dans l'attestation des évêques de cette année. Elle disparaît ensuite complètement pour des raisons inconnues.
" C’est une découverte majeure " car elle vient corroborer des récits datant de l'Antiquité, explique Mounir Fantar, directeur de la mission archéologique. " Les vestiges s'étendent sur 20 hectares dans le Cap Bon, et les expéditions ont prouvé dès 2013 l'existence de la cité antique de Néapolis, qui a été engloutie " continueFaouzi Mahfoudh, directeur de l’INP. Les prospections sous-marines ont mis au jour des rues, des monuments et surtout près d'une centaine de cuves servant à la production de "garum", un condiment à base de poisson dont les Romains étaient très friands.
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" Cette découverte nous a permis d’avoir la certitude que Néapolis était un grand centre de production de garum et de salaison, probablement le plus grand centre dans le monde romain. Et que les notables de Néapolis devaient vraiment leur fortune au garum ", ajoute l’archéologue. L'onéreux garum, dont le goût s'apparente à celui du nuoc-mam vietnamien, était transporté dans des amphores " qui ont été exportées à travers presque toute la Méditerranée et ont dressé des ponts entre les différentes villes ", selon le chercheur.
Crédit photo : UNO - L’Università a Oristano
M. Mahfoudh a précisé que les récentes fouilles réalisées par une équipe d’archéologues tunisiens et italiens se sont basées sur une localisation antérieure du site archéologique en question. Mr. Mahfoudh, qui est également universitaire spécialisé en histoire et en archéologie, a tenu à préciser que les causes ayant conduit à la submersion de cette cité, surtout les cuves servant à la production de Garum, sont encore sujet de controverses scientifiques (avec son collègue Mounir Fantar, qui est plus convaincu de l'hypothèse tsunami et qui a indiqué qu'un rapport final de ces fouilles, étalées sur sept ans par l’équipe conjointe de chercheurs sera présenté début 2018, dans le cadre de rencontres scientifiques qu’abritera l’Académie Lincei à Rome (Italie).).
" On ne peut affirmer, aujourd’hui, avec certitude que c’est un séisme ou un tsunami qui auraient entraîné une prolongation de la côte et la disparition de ce vestige sous la mer ", a dit M. Mahfoudh. Selon la même source, il serait encore trop tôt pour se prononcer à ce sujet, qui exige une étude scientifique approfondie sur la base de prélèvements géologiques et un échantillonnage effectués par des scientifiques issus de diverses disciplines.
Il a annoncé que les résultats des fouilles devraient être présentés dans le cadre de rencontres académiques prévues par l'INP, pour des mois d'octobre et novembre prochains avec la participation de l'université Sassari-Oristano d'Italie.
Crédit photo : UNO – L’Università a Oristano
Pour sa part, Ahmed Gadhoum, expert dans les fouilles sous- marines, a indiqué que le site submergé par les eaux est un prolongement du site de Néapolis terrestre préservé - renfermant aussi des cuves de poissons datant de l'époque romaine - et qui est mis sous la tutelle de l'Agence de mise en valeur et valorisation du Patrimoine (AMVVP), un organisme qui veille à sa préservation et à son exploitation comme site archéologique ouvert au public.
M. Gadhoum a expliqué que, suite à la montée des eaux sur les côtes de la Méditerranée, durant les deux derniers millénaires, plusieurs sites archéologies ont été submergés dans différentes villes du littoral. L’expert est également d'avis qu'on ne peut affirmer avec certitude que le tsunami, cité par d’anciens historiens, serait la cause directe de la submersion de cette cité et par conséquent de la disparition de Néapolis. Apporter des preuves scientifiques tangibles basées sur une étude méthodologique et des prélèvements sur les lieux des fouilles seraient donc nécessaires pour affirmer la véracité d'une telle hypothèse, a conclu le spécialiste.
Petites dissensions donc entre les équipes italiennes et tunisiennes sur l'origine de l'engloutissement de cette partie de la cité, mais le fait est que ces ruines existent bien au large et sous plusieurs mètres d'eau marine... et que plusieurs séismes et tsunamis ont bien été enregistrés et retrouvés par les spécialistes en ce qui concerne la Méditerranée...
Oiniadai (ou Œniadæ) est une très ancienne cité située en Étolie-Acarnanie, près de l'embouchure de la rivière Achelous. On sait que vers 550 avant JC, la cité était bien connue des civilisations antiques, mais un aspect étrange en ce qui concerne son port est qu'il se situe de nos jours à 3 kilomètres à l'intérieur des terres ! Un gros contraste avec d'autres cités grecques que l'on découvre de nos jours englouties sous les eaux à cause de la montée de ces dernières...
En fait, grâce à une étude géologique, on sait maintenant que la ville était assise sur une ancienne île rocheuse à l'intérieur du delta formé par le fleuve tumultueux et qu'il y a donc eu une relation facile avec la mer Ionienne... vers 3000 ans avant JC.Et qu'effectivement, un ancien port de cette période y a bien été trouvé : https://geomorphologie.revues.org/645. Mais, il y a 3500 ans environ, les alluvions du fleuve ont commencé à boucher et combler le delta, éloignant petit à petit la mer des ports (car plusieurs ont donc été construits au fur et à mesure du temps) de la région...
On sait aussi que la ville est citée (Tite-Live - Histoire Romaine) pour avoir joué un rôle important lors de la Campagne de Grèce (-211) et aussi qu'elle frappait sa propre monnaie. La ville est aussi sujette à des troubles, comme Athènes, lors de l'Edit d'Alexandre (-324) : En 324 av. J-C prit fin l’époque de Lycurgue (avec sa mort) à Athènes. Ce fut alors l'Edit d'Alexandre et le début des troubles. A l’extérieur de la cité grecque, l’édit d’Alexandre provoqua le retour des exilés ce qui impliqua pour Athènes l’abandon de l’île de Samos et de nombreux troubles politiques. Nous possédons un document qui présente un des aspects de la crise extérieure d’Athènes, il s’agit du décret d’Antiléon de Chalcis: Dès -324, Athènes essaya de sortir de sa solitude, elle se tourna alors vers une puissance un peu excentrique: l’Etolie (se trouvait dans la partie nord occidentale de la Grèce). Les Étoliens avaient, eux aussi, expulsé les habitants d’une cité, celle d’Oiniadai, et ils ne voulaient pas non plus se plier à l’édit d’Alexandre...
Des cales de bateaux - ancien port - Heinz Schmitz - Antike Schiffswerft in Oiniadai (Griechenland) - CC BY-SA 2.5
Les restes de Cissa sont au fond de la mer Adriatique dans la baie de Caska, Ile de Pag - photos Adrias Project - DAMELET / CCJ / Aix Marseille univ. / CNRS
Si on regarde la configuration des fonds marins de la Méditerranée il y a environ 12000 à 10000 ans, juste avant la fin de la dernière grande période glaciaire et la fonte des glaces entraînant à la fois une montée des eaux et un rehaussement du socle continental suite à l'allègement du poids des glaces, on constate que de nombreuses côtes et îles/presqu’îles possédaient plus de surfaces habitables que de nos jours. C'est une évidence qu'auparavant comme aujourd'hui, l'être humain était très présent en bord de mer, pour de multiples raisons qui vont de la nourriture au climat marin souvent plus doux. La Mer Adriatique, entre l'Italie et les anciens pays yougoslaves, les Balkans, ne déroge pas à cette règle, avec de plus une très grande surface à l'air libre en remontant vers la Baie de Venise et Trieste par exemple (ville et baie qui nous démontrent d'ailleurs que la Mer monte toujours et de plus en plus). Le fait que le grand fleuve Pô déverse un gros volume de sédiments contribue néanmoins d'une part au comblement de certaines baies (le golfe d'Hadria, ville étrusque bâtie vers le 6ème siècle avant J.-C. et qui a donné son nom à la Mer a disparu suite à son comblage par les alluvions du Pô) et à la limitation de la montée des eaux par endroits.
Il n'est dont pas très surprenant que de probables lieux de la préhistoire européenne soient engloutis dans l'Adriatique, mais que les boues sédimentaires font qu'ils sont inaccessibles du côté Ouest (italien) de la mer, alors que l'inverse se produit du côté Est, qui est géologiquement beaucoup plus karstique et découpé, composé de nombreuses îles et îlots... et de fonds accessibles. C'est dans ce contexte que des recherches archéologiques marines se développent de plus en plus le long des côtes de l'Est Adriatique. D'autant plus que plusieurs légendes et quelques textes nous informent que des cités ont possiblement été englouties, et que des pays ayant bénéficié de bons apports touristiques comme la Croatie par exemple possèdent plus de moyens financiers que d'autres et perçoivent l'intérêt touristique de ce potentiel attrait historique supplémentaire à la beauté des lieux et au climat...
Des découvertes récentes semblent aller dans ce sens, et même si on ne parle pas de sites préhistoriques très anciens comme au large d'Israel par exemple, les découvertes n'en sont qu'à leur début...
La Terre (centrée sur l'Europe) à la fin de la dernière période glaciaire (les glaces ne sont pas indiquées)
Cités englouties, données compilées - MAJ 19-08-2014
Dwarka, Inde
Comme on le sait avec de plus en plus de fiabilité et de précisions, l'être humain et ses civilisations ont connu dans le passé des bouleversements souvent catastrophiques, non seulement liés aux migrations de peuples envahissant les autres et guerres de territoires, mais le plus souvent liés aux bouleversements climatiques dus aux périodes glaciaires-interglaciaires et aux éruptions volcaniques, séismes et tsunamis (qui sont souvent des conséquences de précédents événements eux-mêmes). Tous ces bouleversements, souvent méconnus, sont découverts de nos jours et apportent un éclairage nouveau sur des disparitions de civilisations ou même d’ethnies humaines et races animales du passé. Un grand nombre de ces données réapparaissent d'endroits aujourd'hui sous les eaux et nous font comprendre et réaliser l'immensité réelle des territoires ainsi perdus et engloutis, et la probabilité que certains territoires aient bien été habités par des milliers, voir des millions d'individus à certaines périodes. L'un de ces énormes endroit disparu est bel et bien en train d'être redécouvert au nord de l'Europe avec la civilisation du Doggerland et ses probables annexes englouties vers l'Ecosse et la Scandinavie. Mes réflexions me font pour l'instant penser que les anomalies récemment découvertes dans la Mer Baltique (attention, ce dossier a commencé en 2012 !) font bien partie de la même période que cette civilisation du néolithique du Doggerland et qu'il s'agit de territoires et paysages possiblement terraformés par l'homme...
Commençons donc déjà cette compilation de données avec celles déjà présentes sur ce site en ordre dispersées, je me propose de les réunir par océans/mers et par coordonnées des parallèles géographiques classiques (adaptable) - notez bien qu'il s'agit de cités ou ruines englouties par les eaux, mais aussi par la jungle parfois ou les boues volcaniques, les sables et également parfois dans des lacs ou fleuves, il est aussi question de vestiges sur des îles...
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